Là, sur la photo c’est moi. Je suis au Km0 au bout de la terre après un périple de plus de 1680Km depuis le Puy en Velay.

Pour arriver là, il m’a fallu trois ans.

Ce chemin m’appelait depuis quelques temps mais je n’avais pas le courage de me lancer seul, comme ça. Et puis j’ai découvert « les premiers pas ». Début septembre 2021 je pars du Puy avec huit pèlerins qui, comme moi, vont découvrir ce chemin. Nous marchons ensembles six jours, Marc, notre accompagnant nous guide, nous conseil, il est discret mais il veille sur nous et il nous donne les clés de ce chemin.

Le groupe se sépare à Nasbinals et je continu seul jusqu’à Conques. Cette partie en solitaire est une vraie révélation. Je m’arrête à Conques mais c’est promis, l’année prochaine je repars d’ici, seul, et je termine la voie du Puy.

Un an s’écoule, je reprends mon sac et je pars de Conques, direction Saint Jean Pied de Port.

Vingt-trois jours de marche, de rencontres, de vie entre pèlerins ou on partage tout, la fatigue, parfois la souffrance, les rires, les joies, les bons et les mauvais moments, les dortoirs, les repas, les confidences, l’amitié et la bienveillance. Vingt-trois jours de pur bonheur et le sentiment d’être plus vivant que jamais. J’arrive à Saint Jean, je suis bien, je n’ai pas envie de m’arrêter.

Je dois rentrer chez moi, alors je me fais la promesse de repartir de Saint Jean dans un an et d’aller jusqu’au bout de la terre, le cap Fistera en passant par Santiago de Compostela bien sûr.

Septembre 2023, je reprends mon bâton de pèlerin et je me lance à travers l’Espagne. Le défi est de taille 850Km dans un pays que je ne connais pas (je ne parle pas espagnol).

Mais maintenant, je suis prêt. Je sais que quoiqu’il se passe, j’irai au bout, c’est une certitude pour moi. Bien sûr, je suis prudent, je gère mon effort, je suis à l’écoute de mon corps qui me parle, aux petites douleurs ou autres signes qu’il faut prendre au sérieux. Et comme les années précédentes le corps se fait et au fil des kilomètres il devient de plus en plus efficace, le moral est au top et je passe 35 jours de pur bonheur avec des dizaines de rencontres et d’expériences d’une richesse incroyable.

Sur le camino francés les villages se succèdent ponctués régulièrement de villes plus importantes. Chacune à son caractère et elles sont toutes belles. Pampelune, Puenta la Reina, Logroño, Najéra, Burgos, Sahagun, Léon, Portomarin…

J’ai préféré les alberges municipales ou religieuses, elles ne prennent pas de réservation mais elles sont au cœur des villes et l’ambiance jacquaire y est garantie.

Le pays change au fil des kilomètres, la Navarre, la Rioja, Castille et Léon et la Galice si particulière avec ses faux airs de Bretagne.

J’ai choisi de partir seul, mais je ne le suis que rarement, il y a toujours un(e) ou des compagnons (compagnes) pour partager ce chemin. Chacun marche à son rythme, on fait connaissance puis on se perd de vue pour se retrouver parfois quelques étapes plus loin au hasard des hébergements.

On se parle, on s’écoute, on évoque les rairons qui nous ont poussées sur le chemin, on refait le monde plus beau, plus juste.

On avance, les kilomètres diminuent et Santiago apparait. Quelle émotion lorsqu’on se trouve devant le panneau d’entrée de la ville. Ce n’est pas le plus bel endroit du camino mais la charge émotionnelle est si forte. On rit, on pleure, on se serre dans les bras, on y est, on l’a fait !